Tué par une friteuse !

(Par Hervé This)

On m’envoie un lien : un homme est mort, « tué par sa friteuse ».

A l’analyse, c’est l’huile qui s’est enflammée, et qui s’est renversée sur lui, sans doute parce qu’il tentait d’éteindre l’incendie. Au-delà du drame, qu’il faut déplorer, il y a la nécessité de donner quelques informations importantes, pour tous ceux qui font chauffer de l’huile.

1. Chauffer de l’huile à 180 °C, voire plus, c’est faire quelque chose de très dangereux, qu’on ne ferait sans doute pas dans l’environnement contrôlé d’un laboratoire, ou alors avec les plus grandes précautions  !
D’autant que, quand on utilise  des casseroles pour  faire chauffer de l’huile, on ne mesure pas la température, de sorte que la température peut monter bien plus qu’il n’est voulu.
Il y a donc le danger de brûlures, mais, aussi, le danger d’inflammation. Et s’il y a danger, il faut donc éviter les risques.

2. Quand l’huile est chauffée très fortement, elle peut s’enflammer spontanément. Et il faut donc absolument éteindre l’incendie.

3. Surtout, jamais d’eau pour éteindre un incendie de friteuse… sans quoi il y a en plus le risque d’une explosion, et de catastrophe absolue.
J’analyse :
– quand on verse de l’eau sur de l’huile (A NE PAS FAIRE !!!), elle est plus dense que l’huile, donc tombe sous l’huile
– mais quand l’eau est chauffée à plus de 100 °C, elle s’évapore
– or un petit gramme d’eau liquide  fait environ un litre de vapeur ; pour une quantité d’eau qui serait de l’ordre du kilogramme (un litre), l’évaporation conduirait à la formation de mille litres, soit un mètre cube
– l’apparition soudaine d’un tel volume de vapeur conduirait à la projection de toute l’huile qui serait sur la vapeur (on se souvient : de l’huile brûlante, et enflammée de surcroît)
– et la formation d’une grande quantité de gaz, soudainement, ferait un souffle  analogue à celui d’une explosion.
Bref, jamais d’eau sur de l’huile enflammée !

4. Que faire, alors ? Le mieux, prendre une grande casserole, ou un moule très large, et le poser sur la casserole enflammée, en même temps que l’on coupe la source de chaleur. Laisser l’objet posé au dessus de l’huile pendant quelque temps, sans toucher à rien. L’absence d’oxygène conduira à l’extinction des flammes, et l’on pourra alors attendre le refroidissement.

Bref, il y a des cas qu’il vaut mieux anticiper, et je me demande si tous les cuisiniers ne devraient pas bénéficier d’un exercice d’extinction d’huile enflammée (sur de très petites quantités), avant d’être autorisés à « conduire une cuisine ».

A nouveau : quand il y a du danger, réduisons les risques !

Hervé This
THIS Hervé DR