Agapes fraternelles pour les Francs-Mâchons et leurs amis des confréries gourmandes lyonnaises, à La Voûte, Chez Léa.
Qu’importe le flocon… La première neige tombait sur la ville ce matin là. Mais il en aurait fallait plus pour refroidir les ardeurs gourmandes des quatre vingt convives réunis à l’appel des Francs-Mâchons lyonnais chez maître Philippe Rabatel, à « La Voûte, Chez Léa » place Antonin Gourju. Ces ardents défenseurs de la tradition y avaient récemment conviés les membres d’une dizaine de confréries amies à partager leurs matinales agapes réunissant – « à l’heure où l’on boit doucement pour faire naître la soif sans gâcher la faim», selon l’heureuse formule du romancier Frédéric Dard – des fidèles heureux de célébrer ainsi le culte de l’amitié et de la bonne chère. Belle occasion de sacrifier avec force et vigueur à ce rituel du mâchon par lequel la capitale de la gastronomie s’affirme plus que jamais comme un haut lieu de la résistance culinaire… face à la déferlante des goûts venus d’ailleurs.
« A Lyon, on ne se connaît pas tant qu’on n’a pas mangé ensemble » affirmait avec pertinence le regretté Félix Benoit. Alors ce matin là, on a largement pris le temps de se (re)connaître entre ces dames du « Mâchon des filles » et ces messieurs des « Amis de Guignol », de « la République des Canuts » , des « 21 de Montauban », des « Traines Groles », de « l’Ordre de la Raie », de « la Confrérie du Cardon » , de « Ceux qui n’ont jamais soif » et autres « Mangeurs du matin »… Sans oublier « les Compagnons du Beaujolais ».
« Le mâchon lyonnais est la messe matinale des vrais gones » ajoutait encore un Félix Benoît gourmand comme un chanoine. Toutes et tous ont donc communié avec ferveur, sous les deux espèces, lors de cet office concélébré par quatre zélés servants. S’il a laissé son cher « Morgon » de la rue Baraban entre de nouvelles et bonnes mains, Jacques Porcu a démontré qu’il n’en restait pas moins fidèle à la Saint Cochon avec un fromage de tête d’exception.
Puisant lui aussi aux sources du catéchisme lyonnais, le maître des lieux Philippe Rabatel a ensuite fait l’offrande de cette moelleuse et aérienne quenelle aux écrevisses qui fait accourir dans son établissement tant d’adeptes en quête de vérité des assiettes.
Avant que l’andouillette en croûte préparée par Serge Bertrand, dont « L’Olympic » fait de la route de Vienne une autre étape incontournable du pèlerinage gourmand en terre lyonnaise, ne suscite l’adoration des convives.
Bienheureux convives que la tarte aux pralines de Jean-Marc Roman, du « Café des deux Places », place Fernand Rey, n’a fait que plonger davantage dans le péché de gourmandise. Toute honte bue ; et pas seulement la honte ! Préposés aux « burettes » quatre vignerons du beaujolais ont généreusement rempli leur office et les verres ! Beaujolais blanc de Mathelin père et fils, domaine Sandar, de chez Jomain, domaine du Puits du Besson, puis Fleurie de la Roilette chez Alain Coudert et Morgon de Vincent Flache ont marqué les quatre temps de ces chaleureuses agapes.
Orchestré magistralement par Pierre-Louis Delfante, efficace maître ce cérémonie, ce mâchon des chefs était de ces instants qui donnent des couleurs à la vie et où, comme l’écrivait si bien l’irremplaçable Frédéric Dard : « si les Francs-Mâchons savent que si Dieu n’existe pas, il fait en tout cas rudement bien semblant… »
De nos honorables correspondants:
Jean-Jacques Billon pour lyon-Saveurs et Pierre-Louis Delfante (Crédit photos)
Trackbacks / Pingbacks