Pour suivre notre article du 5 janvier 2020, relatif au décès de Georges Dubœuf la veille, le Président de l’Inter profession du Beaujolais, Dominique Piron, rend hommage à Georges Dubœuf au nom de toute la profession
Une page se tourne en Beaujolais, Georges Duboeuf s’en est allé
À son corps défendant, Il a préféré « l’au-delà au vin d’ici », comme le disait élégamment Pierre Desproges qu’il avait reçu comme tant d’autres à Romanèche-Thorins
Il faut se remettre un peu dans le contexte historique.
Georges Duboeuf est né en 1933 à Chaintré, où sa famille cultive la vigne depuis quatre siècles.
La création des appellations en France par l’INAO dès les années 1936 a permis au monde de la production de se concentrer sur des valeurs d’éthiques, de terroirs…Mais les choses n’ont pas avancé bien vite.
Les tensions de la guerre, et la reconstruction de l’après-guerre ont laissé dans les années 50 la France dans un état de faiblesse générale et tous les vignobles de France avec.
C’est dans ce contexte des années 50, que Georges Duboeuf a commencé sa vie professionnelle, en allant de vignerons en vignerons, de cave en cave, initier un nouveau métier « la mise en bouteilles à la propriété », essayant de convaincre, tel un missionnaire que pour séduire le consommateur, le métier devait évoluer.
Il a vu rapidement où était la direction à prendre dans ce vignoble. C’est ainsi qu’il s’est installé à son compte en 1964.
Son intuition lui a permis de tracer un chemin tout neuf, son propre chemin au début, qui plus tard deviendra un fil conducteur pour beaucoup d’autres, sans jamais se retourner et sans jamais manquer aucun rendez-vous de ce chapitre de l’histoire du Beaujolais.
Par sa vision et son travail, il a redonné de la vie, de la couleur, des arômes, quelque chose de joyeux, à ces vins du Beaujolais. Il a été un catalyseur, emmenant avec lui d’autres négociants et d’autres vignerons, et le Beaujolais a été ainsi le premier vignoble de France à refaire la une des journaux et télévisions, en France et dans le monde. Nul n’a oublié, tant à l’occasion du Beaujolais Nouveau ou de la Fête des Crus, tout ce qui se passait alors, à son initiative, du côté de son cher Hameau du Vin. Et beaucoup ont vibré avec lui, au cours de ces soirées du 14 novembre sur le coup de minuit, dans les années 70 à 90, avec le frisson de l’émotion, pour ces vins Nouveaux qui partaient aux quatre coins du monde dans une ambiance de fête, aux sons des fanfares, des klaxons des camions et des cloches de l’église de Romanèche-Thorins.
Parfaitement soutenu dans sa « quête du bon », par Paul Bocuse, Georges Blanc, Pierre Troigros, Jean Paul Lacombe et beaucoup d’autres, Georges Duboeuf a été un initiateur, un précurseur, un Grand Monsieur comme on n’en rencontre pas souvent.
Fidèle à son style, tout au long de sa vie, il a entrainé ce vignoble et ses vignerons, les emmenant au bout du monde, ou amenant chez eux, dans leurs caves, ses clients du bout du monde, dans un véritable partenariat. Il a été le catalyseur de cette région au début, puis ensuite son infatigable ambassadeur.
Et si Paul Bocuse son ami de toujours avait fait sortir les cuisiniers de leurs cuisines, Georges Duboeuf a fait sortir les vignerons de leurs caves… Et si le premier nommé fut « sacré » Pape de la Gastronomie, bon nombre d’amoureux des vins n’ont pas hésité à voir en lui le Pape du Beaujolais.
Derrière une voix chaude, grave, rassurante, presque envoutante se cachaient beaucoup de choses pleines de force. C’était du goût, un nez, de l’intuition, de la vision, une mémoire énorme et surtout beaucoup de travail.
Beaucoup de charisme également chez cet homme discret, mais tout aussi bien à l’aise avec tous les vignerons dont il connaissait parfaitement leur métier, qu’avec les nombreuses vedettes du show business qui passaient chez lui.
Au nom de tous les vignerons et négociants, Inter Beaujolais rend hommage à cet homme dont le nom restera inscrit dans l’histoire du Beaujolais.
Aujourd’hui, la notoriété est là, l’entreprise familiale en de bonnes mains avec son fils Franck Duboeuf à la barre, l’aventure va continuer. Ce n’est pas la fin d’un livre, mais seulement celle d’un beau et long chapitre.
En tous cas, chapeau bas, vous étiez un honneur pour le Beaujolais,
Merci « Monsieur Georges » pour ce que vous avez apporté.
Dominique Piron, président d’Inter Beaujolais, le 05 janvier 2020