Puisque j’ai un peu de temps…

Posted: 29 Dec 2013 05:37 AM PST par Hervé This

… j’en profite pour continuer de décoder.

Cette fois, une phrase :  » en cuisine, la contagion chimique a gagné le monde entier,  parce que ça coûte beaucoup moins cher d’utiliser des molécules produites dans des usines que des produits naturels! Il est vrai que 800 grammes de Mannitol, ça coûte moins cher que 800 grammes de truffe blanche d’Alba ».

Allons y doucement, c’est un gros morceau !

En cuisine : là, je comprends, on confectionne des aliments, c’est-à-dire des assemblage de composés, qui ont une fonction
– nutritive
– sensorielle
-symbolique
-culturelle
-politique
– …

La « contagion chimique » ? Nos pauvres interlocuteurs ont une rhétorique bien faible, car la cuisine est tout entière chimique : quand on grille une viande, on transforme les composés initialement présents, et l’on fait de la chimie ! La chimie n’est donc pas l’apanage de multinationale qui nous voudraient du mal !

A gagné le monde : au fait, pourquoi le monde s’est-il laissé faire ? Parce qu’il veut payer moins cher ? Parce qu’il n’a pas la moyens de se payer de la truffe et qu’il voudrait quand même partager le bonheur de ce goût parfois intéressant ? Parce que c’est moins obscurantiste qu’une cuisine qui date du moyen âge ? Parce que… Bref, n’est-ce pas une façon de prendre le public pour des imbéciles que de lui refuser le droit d’être « contagié » ?

« Ca coute moins cher d’utiliser des molécules produites dans des usines que des produits naturels » ? Une phrase dont la généralité est condamnable : certains principes actifs des médicaments qui nous soignent coûtent au contraire beaucoup plus cher ! Et il est bien plus coûteux de synthétiser des vitamines que de les extraire des produits végétaux ! D’ailleurs, même les fabricants de composés pour les laboratoire de chimie nous vendent les composés purs au prix de l’or ! Et, souvent, ils les purifient à partir des produits naturels.
Pour revenir en cuisine, une huile essentielle (de citron, par exemple) coûte bien plus cher que les citrons qui ont permis de fabriquer l’huile essentielle !

Le mannitol coûte moins cher que la truffe blanche d’Alba : certes… mais le mannitol n’a pas à être comparé à de la truffe blanche ! Le mannitol ne donne pas le goût de truffe. A vrai dire, je ne comprends absolument pas cette comparaison… incompréhensible, sauf à penser tandencieusement.

Bref, quel est le message inavoué ? 

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Au fond, nest-ce pas une question d’argent ?

Posted: 29 Dec 2013 04:13 AM PST par Hervé This

Partons d’un fait : il y a quelques journalistes (et le public qu’ils représentent, ce qui n’est pas rien) qui s’offusquent des propositions visant à changer notre alimentation.
Ce fut le cas pour la cuisine moléculaire, et c’est le cas pour la cuisine note à note.

D’où la question : puisqu’il n’est pas question de FORCER ces gens à manger différemment, pourquoi gesticulent-ils ?

Bien sûr, il y a les quelques journalistes qui veulent vendre du papier, du scoop, du scandale. On n’y peut rien, et ils continueront de hurler. Donc pas la peine de se fatiguer beaucoup à leur répondre.
Ensuite, il y a ceux qui ont peur… mais de quoi ?
Dans un pays comme le nôtre, avec des artisans et des sociétés plus grosses (où serait la différence entre l’artisanat et l’industrie ?), il y a certainement une volonté de préserver les petits producteurs. Mais si c’est cela la raison, pourquoi ne pas l’avouer franchement ?

D’ailleurs, ne pourrions-nous viser d’avoir TOUT : les produits de l’artisanat ET les produits de base que fournit l’industrie ?

On le voit, ces discussions à propos d’un article médiocre sur la malbouffe ne conduisent qu’à enchaîner des banalités, à observer que le monde est une sorte de foire d’empoigne. Où l’argent est la cause inavouée des discussions. Rien de nouveau !
Comme me le conseille Jean-Marie Lehn, laissons causer, et bâtissons !

D’où le détournement de l’idée initiale : j’avais imaginé de vous parler de « malbouffe », mais, à la réflexion, le terme me va mal. Il y a les mets produits par la cuisine, et la « bouffe » : le mot « malbouffe » est une périssologie (voir billet précédent : un pléonasme fautif). Sans intérêt : ne vaut-il pas mieux se préoccuper de ce qui est bon ?

D’où la vraie belle question : qu’est-ce qui est bon ?
A cette question, il y a :
– le bon sensoriel
– le bon à manger politiquement
– le bon à manger symboliquement
– le bon à manger nutritionnellement
– le bon à manger toxicologiquement
Et la question est : quel est le bon mélange ? Ne comptez pas sur moi pour répondre : la question est bien difficile, mais, déjà, si les choses sont claires, c’est un progrès, n’est-ce pas ? 

LYON-SAVEURS

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