Attention aux fortes concentrations en molécules odorantes
Posted: 02 May 2021 11:59 AM PDT
De même que l’on apprend à se servir d’un couteau, il y a lieu d’apprendre à se servir des composés, qu’ils proviennent de végataux ou non. Avec cette idée forte (et insuffisante) selon laquelle la dose fait le poison. J’insiste : c’est une bonne idée pour commencer, mais elle est insuffisante, et le cas des perturbateurs endocriniens.
Mais allons-y lentement, et commençons par des choses simples.
Pour certains composés, telles certaines vitamines, il y a un effet bénéfique, à petite dose, puis un effet négatif quand la dose augmente.
Pour d’autres composés, on ne connaît pas d’effet positif à petite dose, et, à partir d’une certaine dose, des effets négatifs sont observés.
Or les composés odorants des plantes (par exemple, les aromates) sont… des composés. Et ils sont donc des deux types précédents, par exemple.
Autrement dit, si l’on peut manger sans difficulté du persil, de la ciboulette, du thym, par exemple, il serait inconscient de boire un verre d’huile essentielle de persil, de ciboulette ou de thym. Ou pire, d’estragon, de basilic, de noix muscade !
Ce qui est dit ci-dessus des aromates vaut en réalité pour tous les fruits et légumes, mais, aussi, pour de nombreux composés des viandes et des poissons. Répétons : c’est la dose qui fait le poison, et c’est la (petite) dose qui fait que quelque chose n’est pas poison.
D’où des précautions à prendre par ceux qui extraient des composés afin de les concentrer. Par macération, par infusion, mais aussi par distillation, entraînement à la vapeur d’eau, distillation sous vide, et ainsi de suite.
Bien sûr, il n’est pas impossible d’utiliser des huiles essentielles en cuisine… mais il faut alors apprendre à les diluer… et tout cela se fonde sur des données toxicologiques qu’il est important de connaître. Souvent, ces données sont publiques, dans des articles scientifiques ou dans les bases de données des agences de sécurité sanitaire, telle l’agence européenne (Efsa) ou l’agence française (Anses).
Ayant ces données, il faut apprendre à diluer… sans se tromper dans les calculs, bien évidemment… et je dis cela partce que j’ai vu nombre d’étudiants en science et technologie des aliments qui faisaient des erreurs de calcul. Autant cela n’est pas gravissime quand on passe un examen, autant il devient criminel de le faire si l’on fait consommer des composés trop concentrés.
Et j’en arrive à ces perturbateurs endocriniens… qui sont sous nos fenêtres. Par exemple, une revue médicale a publié il y a quelques années le cas de petits garçons qui se mettaient à avoir des seins… parce que leurs parents mettaient des sels de bain à la lavande dans leur bain. La lavande contient des « perturbateurs endocriniens », à savoir des composés qui interagissent avec les hormones, même à de très faibles doses.
De sorte que, personnellement, j’évite les aliments où les chefs ont mis de la lavande : oui, cela sent bon, mais je vous le laisse. Tout comme je laisse les épluchures de pommes de terre, les plats trop chargés en noix muscade, les infusions de grappes de tomates, et bien d’autres préparations.
La conclusion ? De même qu’il faut apprendre à se servir d’un couteau, il faut apprendre à se servir des techniques de conservation (si nous ne voulons pas intoxiquer les convives), il faut apprendre à se servir des composes (si nous ne voulons pas empoisonner les convives).
Et le goût n’est pas une garantie de sécurité suffisante : par exemple, les sels de plomb sont merveilleusement « sucrés », mais ils provoquent une terrible affection nommée saturnisme, dont je ne donne pas ici la description pour ne pas troubler votre digestion.
On nourrit nos amis, notre famille ?
Apprenons la prudence !
–
Hervé THIS