Ne pas tout confondre par ignorance ou par idéologiePosted: 05 Feb 2020 05:35 AM PST Alors que le restaurant de Paul Bocuse vient de perdre sa troisième étoile, je vois un journaliste prendre la défense de ce restaurant et dire que là, enfin, on a de la vraie cuisine française et pas ces viandes standardisées cuites à basse température.
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Je ne cherche pas ici à prendre parti pour ou contre la troisième étoile du restaurant où Paul Bocuse n’est plus, mais simplement de discuter cette idée selon laquelle le rôtissage ou d’autres cuissons de ce type (lesquelles ?) vaudraient mieux que la cuisson à basse température. Et je tiens à signaler immédiatement que la critique faite aux cuissons basses température s’apparente en tous points au critiques que faisaient certains, au début du 20e siècle, quand le gaz est arrivé à tous les étages et que l’on a cuit autrement que par du bois ou du charbon.
D’ailleurs, ces critiques sont du même type que celles qui sont apparues quand on a introduit les mixers, avec lesquels on a fait des farces bien plus fines que par le passé, au tamis, en y passant des heures.
Ou quand on a commencé à utiliser les feuilles de gélatine plutôt que le pied de veau.
Ou encore quand on a produit des mousses au siphon, au lieu de passer de longs moments au fouet. Et ainsi de suite…
Dans tous ces cas, on ne peut s’empêcher de penser à la crise des canuts à Lyon, ou aux Luddites, c’est-à-dire quand des techniques modernes ont mis des gens au chômage. Oui, dans chaque cas, il y a l’avènement de systèmes techniques modernes qui facilitent le travail, mais qui sont refusés pour des raisons en réalité idéologiques, politiques.
Mon point de vue : si c’est le cas, disons le franchement, sans incriminer la technique pour ce qu’elle produit, mais pour ses conséquences.Mais revenons à cette question de la basse température pour observer que les grands auteurs de cuisine du passé, en France, n’avaient pas de mots assez élogieux pour le braisage, cette grande opération culinaire française classique, qui fait des viandes parfaitement tendres.
Le braisage se faisait dans une braisière, cendres dessus et dessous, et c’était en réalité de la cuisson à basse température, sauf que l’on avait le plus grand mal à contrôler la cuisson et que l’on savait bien que le moindre coup de feu ruinait tout. Un coup de feu, cela signifie passer à plus haute température, et effectivement, c’est pour les éviter que la cuisson basse température a été introduite. La cuisson à basse température, il faut le répéter, c’est du braisage, et du braisage parfait en quelque sorte. D’autant que « la » cuisson à basse température n’existe pas : il y a mille cuissons à basse température, et les résultats sont tous différents. De même, la fraise n’existe pas : il y a mille fraises différentes, aux goûts tous différents. Il y a mille belles cuissons, et c’est en le reconnaissant que nous ferons grandir l’Art culinaire. |